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13 avril 2024 6 13 /04 /avril /2024 16:11

Mortalité maternelle dans le monde

La mortalité maternelle en France est très faible, similaire à celle du reste des pays européens, et très différente de celle des pays à revenu faible. Ainsi selon l’OMS :

« La mortalité maternelle atteint dans le monde des niveaux inacceptables. Environ 287 000 femmes sont décédées pendant ou après une grossesse ou un accouchement en 2020. Près de 95% des décès maternels, dont la plupart auraient pu être évités, sont survenus dans les pays à revenu faible ou intermédiaire en 2020. » (…)

« On estime qu’en 2020, environ 87 % (253 000) des décès maternels dans le monde sont survenus en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud. Environ 70 % des décès maternels (202 000) sont survenus en Afrique subsaharienne, tandis que 16 % environ (47 000) sont survenus en Asie du Sud. »

« Le grand nombre de décès maternels survenant dans certaines régions du monde reflète les inégalités d’accès à des services de santé de qualité et met en évidence le fossé entre riches et pauvres. En 2020, le taux de mortalité maternelle dans les pays à revenu faible était de 430 pour 100 000 naissances vivantes, contre 12 pour 100 000 naissances vivantes dans les pays à revenu élevé. »

https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/maternal-mortality

 

Mortalité maternelle en France

https://www.santepubliquefrance.fr/etudes-et-enquetes/enquete-nationale-confidentielle-sur-les-morts-maternelles

Une source importante de connaissance sur la mortalité maternelle en France est fournie par l’enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM).

Depuis 1996, l’Enquête nationale confidentielle sur les morts maternelles (ENCMM) est réalisée en France en continu. La responsabilité scientifique de cette enquête permanente a été confiée initialement à l’unité Inserm 149 devenue 953 et actuellement 1153 – Equipe EPOPé.

https://cress-umr1153.fr/fr/project/encmm/

L’ENCMM est une enquête menée régulièrement par Santé publique France via le CNEMM (Comité national d'experts sur la mortalité maternelle) et mise en œuvre de manière opérationnelle par l’équipe de recherche en épidémiologie Périnatale, Obstétricale et Pédiatrique (EPOPé) de l’Unité Inserm U1153. L’ENCMM étudie l’ensemble des décès maternels en France. L’unité est dirigée par Catherine Deneux-Tharaux, médecin, directrice de recherche INSERM, responsable scientifique de l’ENCMM, Monica Saucedo, médecin épidémiologiste IR Inserm et Aude Almeras, sage-femme, coordinatrice nationale de l’ENCMM.

De cette enquête est issue un rapport publié chaque trois ans.

Le dernier en date (7 ème rapport ENCMM) concernant 2016-2017-2018 vient de paraître en avril 2024, son résumé est accessible en suivant le lien ci-dessus.

Les « principaux points clé mis en avant par ce rapport sont :

• Entre 2016 et 2018, 272 morts maternelles ont été enregistrées en France, soit une mort maternelle tous les 4 jours et un ratio de mortalité maternelle considérée jusqu’à un an de la fin de la grossesse de 11,8 décès pour 100 000 naissances vivantes, sans diminution par rapport aux périodes précédentes.

• Le suicide devient la première cause de mortalité maternelle considérée jusqu’à un an après la fin de la grossesse, et les maladies cardiovasculaires sont la première cause de mortalité maternelle considérée jusqu’à quarante-deux jours. Ce profil rappelle que la santé des femmes enceintes dépasse la sphère strictement obstétricale.

• Il existe des inégalités sociodémographiques de mortalité maternelle :

– le risque de mortalité maternelle augmente avec l’âge des femmes de façon marquée à partir de 35 ans ;

– la mortalité des femmes migrantes est 2 fois celle des femmes nées en France ;

– les femmes socialement vulnérables sont 1,5 fois plus représentées parmi les femmes décédées.

• Territorialement, les DROM se distinguent par un niveau de mortalité équivalent à 2 fois celui de l’Hexagone

Après une réduction de moitié en quinze ans, la mortalité maternelle par hémorragie obstétricale est à un niveau stable par rapport au triennium précédent 20132015, RMM de 0,9/100 000 NV, dans la fourchette haute des pays européens, et restant en grande majorité (95 %) évitable, ce qui suggère qu’une réduction est encore possible. »

A noter que « la mortalité maternelle limitée à quarantedeux jours après la fin de la grossesse est l’indicateur de référence à des fins de comparaisons internationales, selon la recommandation de l’OMS, et le seul indicateur fourni par la plupart des pays.

Pour la période 20162018, 197 décès maternels sont survenus selon cet indicateur en France, soit un RMM de 8,5 pour 100 000 naissances vivantes (IC 95 % 7,49,8), dans la moyenne des pays européens » et comme il est dit dans les « points clés » :

 les "maladies cardiovasculaires" (voir la répartition des causes proposée par l'ENCMM dans le tableau 2 reproduit ci-dessous) sont la première cause de mortalité maternelle considérée jusqu’à 42 jours post partum, elles représentent la majorité des ces décès : 16 % des décès soit 1,3 décès pour 100000 naissances vivantes.  

Les étiologies les plus fréquentes de ces "maladies cardiovasculaires" (n=32) demeurent les cardiomyopathies préexistantes ou gravidiques (n=10) et les dissections aortiques (n=9). Cette importance des étiologies cardiovasculaires est encore renforcée si on y associe les décès de complications hypertensives gravidiques classées dans les causes directes (n=10), voire les accidents vasculaires cérébraux (AVC, n=18) et les thromboembolies veineuses (n=19). Au sens large la pathologie cardio-vasculaire représente donc 79 décès sur 197 soit 40%. Quant aux 15,7% de "causes inconnues" (31/197décès) il est très probable que la pathologie cardiovasculaire soit aussi impliquée dans bon nombre de cas.

Si on considère la mortalité à un an, les décès par "maladies cardiovasculaires" représentent 14%, le suicide représentant alors la première cause de décès : 17% (la mortalité par suicide à 42 jours représente 3%) ce qui fait mettre en avant le suicide par les auteurs de l’étude comme « première cause de mortalité maternelle »  et l’ensemble des articles de presse l’ont clamé : une cause qu’on ne peut donc directement imputer à la qualité du système des soins prodigués immédiatement autour de la naissance.

La mortalité par suicide n’est spécifiquement étudiée dans l’ENCMM que depuis 2013. En effet l’exhaustivité du recensement de ces cas est particulièrement difficile à approcher. Les « facteurs de confusion » lorsque l’on veut évaluer le lien de causalité entre le suicide et l’état gravide « récent » sont innombrables. Par ailleurs le suicide touche la population en général et la population des femmes en âge de procréer parmi d'autres, parler de cette problématique en matière de périnatalité n’a de sens que s’il existe une surmortalité par suicide dans la population des femmes en âge de procréer ayant accouché depuis moins d’un an par rapport à celles qui n’ont pas accouché ou ont accouché depuis plus d’un an. Cette question n’étant pas posée dans le cadre de l’ENCMM, elle ne peut y trouver de réponse.

C’est très certainement avec de bonnes raisons que l’Organisation Mondiale de la Santé définit la mortalité maternelle en la limitant au 42 jours post-partum et que l’ensemble des pays du globe ont adopté cette définition. La question qui se pose alors est la suivante : quel intérêt ont les épidémiologistes français de la périnatalité à laisser proclamer à longueur d’antenne et de colonne « le suicide est la première cause de mortalité maternelle en France » ?

Si la fragilité du psychisme de la "femme ayant accouché depuis moins d'un an" est sans aucun doute à prendre en compte par l'ensemble des acteurs de l'entourage, c'est clairement l'évaluation correcte et la prise en charge adaptée de l'état cardio-vasculaire et circulatoire des femmes enceintes et/ou ayant accouché récemment que les équipes soignantes de la périnatalité doivent privilégier en matière de prophylaxie de la mortalité maternelle. En maintenant la vigilance quant à la bonne prise en charge des redoutables hémorragies obstétricales sévères, dont la dernière enquête nationale périnatale (données 2021) annonce la remontée d’occurrence (par rapport à 2016, référence ci-dessous).

https://www.lequotidiendumedecin.fr/actu-medicale/le-suicide-devient-la-premiere-cause-de-mortalite-maternelle-en-france

https://enp.inserm.fr/wp-content/uploads/2022/10/rapport-2022-v5.pdf

 

 

 

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  • : Le blog du Collectif Hospitalier pour l'Optimisation Concertée des Soins dans le bassin de vie Montfermeil/ Clichy sous bois et le reste du monde, "CHOCS9cube" est né en 2012. CHOCS9cube est une association loi de 1901 dont l'ambition était initialement de mettre en commun toutes les intelligences, sensibilités, imaginations, connaissances et énergies de notre territoire pour soutenir l'hôpital de Montfermeil situé en Seine-Saint-Denis (93). Après l'éviction de sa présidente de son poste hospitalier en 2013, l'association a poursuivi ses activités et élargi son cadre à la santé, au sens le plus large, et l'organisation des soins dans le 93 et le «reste du monde». Le blog est complété par la page Facebook Collectif Chocsneufcube.
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